Lettre adressée au Président du RCD en date du 22 mai 1999

Situation du parti dans l’émigration

 

Monsieur Kaci REDJDAL

Député de l’émigration - France Zone Sud

Tél /fax : 04 42 23 20 72

A Monsieur Le Président du RCD

Monsieur Le Président,

En tant que militant et élu, mon devoir est de vous interpeller sur notre stratégie politique pour l’émigration. Dans tous nos discours, l’émigration occupe une place importante mais, force est de constater, que ce discours n’est nullement suivi des faits dans la pratique.

Nous venons de vivre une période électorale où notre formation devait jouer un rôle pédagogique extrêmement important afin d’expliquer à nos concitoyens de l’émigration la position de notre parti et de les convaincre de boycotter l’élection présidentielle. A mon grand regret, cette campagne n’a fait l’objet d’aucune stratégie. Les sections qui ont fait campagne ont agi de manière très isolée, sans aucune concertation ni coordination .

D’ailleurs, depuis le 04 /02/1999 , date de la convention nationale, aucune réunion , aucune communication n’a été faite pour préparer cette campagne. L’émigration a toujours été le déclencheur de la participation ou de l’abstention. Notre devoir était de préparer le mieux possible cette campagne afin que notre position de boycott soit suivie mais malheureusement cette campagne a été pour nous le RCD Emigration, la plus morose.

Monsieur Le président,

Notre formation perd sa crédibilité au niveau de nos compatriotes de l’émigration. Notre absence sur le terrain ne fait que conforter l’opinion dans l’idée que le RCD agit de la même manière que les autres partis alors que nous lui avions promis une rupture dans les mœurs et les comportements politiques.

Lors de l’élection législative, nous avions fait une excellente campagne où nous avions pris des engagements vis à vis de nos concitoyens, si ce n’est, d’être à leur écoute, de recueillir leurs doléances et de les porter au niveau des institutions.

En deux ans , nos interventions sur le terrain, très peu nombreuses, se limitent en des distributions très sporadiques de tracts dans certaines zones. Personnellement, en deux ans, je n’ai pas eu l’occasion de rencontrer nos compatriotes à Lyon, Grenoble, Saint Etienne, Nantes, malgré mes nombreuses demandes.

J’ai d’ailleurs interpellé Mr Benyounes, à plusieurs reprises , verbalement et par écrit à ce sujet, mais la situation n’a guère évolué. Pire encore, en cette campagne électorale pour l’élection présidentielle, j’ai reçu une réponse négative à ma demande de passage à Lyon.

Comment peut-on convaincre nos compatriotes de la crédibilité de notre discours sur le changement, lorsqu’ils ne peuvent même pas rencontrer leurs députés ?

Il est évident que la structure de l’émigration est en totale déliquescence. Depuis le congrès, cette structure ne fonctionne plus. J’ai eu l’occasion, à Ramatuelle , en septembre 1998 et à Paris, en décembre 1998, de vous entretenir de cette situation dramatique que vit le RCD dans l’émigration. Je vous avais suggéré l’organisation d’une journée de travail pour discuter clairement de tous les dysfonctionnements de cette structure et de définir le mode le plus approprié d’organisation et de fonctionnement, ainsi qu’une stratégie politique envers notre communauté.

A ce jour, 14 mois après le congrès et quelques mois après notre rencontre, la situation n’a guère changé, bien au contraire, elle s’est aggravée. Les sections sont de plus en plus isolées, les militants sont de moins en moins motivés et nos concitoyens sont de plus en plus déçus par notre absence sur le terrain.

Mais au- delà de la structure organique, il me semble qu’il y a lieu de poser la problématique en terme de stratégie politique de notre parti vis à vis de l’émigration et nous devons avoir le courage de se poser ces questions, que je vous avais d’ailleurs déjà posées en décembre dernier à Paris.

Quelle est la mission du RCD Emigration ?

- Le RCD Emigration doit-il accentuer sa mission envers la communauté et auquel cas, il faut renforcer et organiser les structures organiques afin d’améliorer la communication avec nos concitoyens et à fortiori avoir une stratégie d’un parti de masse donc électorale ?

- Ou bien le RCD Emigration ne constitue–il qu’un relais de communication d’Alger , auquel cas, il faut privilégier les structures des grandes capitales notamment européennes, et d’avoir une stratégie de relations internationales ?

C’est en fonction de ces options, qui ne sont évidemment pas mutuellement exclusives, qu’il y a lieu d’organiser l’émigration afin de pouvoir adapter notre discours à la réalité du terrain, car j’ai le regret de constater aujourd’hui que le discours porte sur la première option mais que la réalité du terrain s’adapte plus à la deuxième option.

Je finirais, Monsieur Le Président, en me permettant de vous préciser qu’un parti ne peut évoluer s’il n’est pas capable de faire son autocritique.

Même si aujourd’hui, tous les signes convergent vers mon isolement et ma marginalisation, (les sections ne me préparent pas mes passages, je ne reçois pas l’information –même pas la convocation au Conseil National- ni pour la réunion des élus- je ne reçois aucune réponse à mes courriers, même ceux où je demande une position politique de notre parti parce que je dois intervenir dans les médias-) , mon devoir est de vous interpeller, vous en tant que premier responsable de ce parti, sur la situation dramatique que vit le RCD Emigration. Il y va de l’intérêt du parti et au- delà, de celui de notre pays.

Veuillez agréer, Monsieur Le Président, l’expression de mes respectueuses salutations.

Aix en Provence, le 22 mai 1999